Rentrer dans l’échange pour de vrai

Sortir du discours

Ce matin, Elio, un garçon de douze ans et demi qui a choisi l’école à la maison m’a demandé quel était mon métier. Je lui ai répondu très simplement : «j’accompagne des collectifs à mieux travailler ensemble, à mieux coopérer. J’aide des entreprises à penser leur organisation un peu différemment, histoire qu’il n’y ait pas qu’une petite poignée de personnes qui décident ce que d’autres auront à exécuter». Bref, des termes que j’emploie assez souvent… et la conversation s’est arrêtée là.
Et puis, en rentrant chez moi, je me suis dit que, j’aurais aimé dire les choses différemment. J’aurais aimé lui dire :
«Ben tu vois, je fais un métier qui devrait être inutile en fait. J’interviens dans des lieux où des personnes travaillent ensemble :

  • pour créer, avec elles, les conditions pour que tout le monde se sente à l’aise et s’exprime, fasse, tente des choses sans avoir peur… peur du jugement, peur de la sanction, du rejet, …

  • Pour faire en sorte que les gens se parlent pour de vrai, c’est à dire, qu’ils se disent les choses telles qu’ils les vivent et qu’ils soient vraiment écoutés, juste écoutés, pas catalogués, condamnés.

  • Pour que les gens se sentent vivants au milieu d’autres êtres vivants et qu’ils fassent ensemble des choses qui ont du sens pour eux.

  • Pour que les gens se rencontrent dans leur singularité plutôt qu’à travers l’image qu’ils souhaitent donner d’eux.»

  • Bref, que des choses qui devraient être évidentes et que ne le sont, en fait, pas ou plus.

     

Parler avec ses tripes 

Et, quand ces mots me sont venus, je me suis réjouie parce que oui, c’est ce que je fais et c’est ce que j’aime faire et c’était tellement plus vrai et incarné que la façon dont je l’ai dit à Elio.

Et puis, au fond de moi, je me suis dit que lui dire cela, ça lui aurait certainement plus parlé, à lui qui a choisi, en concertation avec ses parents, un autre mode éducatif. Peut-être aurions-nous pu parler ensemble de l’équivalence, des rapports de domination,…
Elio m’a donné une jolie leçon de vie, ce matin: parler de ce qui fait sens pour moi, de ce qui me met en mouvement au plus profond, c’est ça qui est vivant et qui permet d’entrer dans la relation pour de vrai. Bref, le fond plutôt que la déclinaison dans la forme! Merci Elio ! Je vais essayer de m’en souvenir !